Ce mot recouvre plusieurs acceptions selon les domaines desquels il participe. On parle de paradigme en sociologie, en philosophie, en logique formelle, en mathématique, en programmation informatique, en esthétique etc. Toujours avec cette constante : un paradigme désigne ce qui est posé avant que quoi que ce soit ne jaillisse. Il est ce qui préside à l’apparition des choses avant que celles-ci n’apparaissent. Le paradigme possède donc une faculté d’ordre matricielle faisant fonction d’origine, de source et de fondation à partir duquel toutes les pensées et les actes peuvent se déployer. Il révèle donc un certain a priori sur le Monde, un certain regard posé sur lui qui déterminera les actions que nous accompliront. Ainsi, pour être validé par la pratique, un système paradigmatique doit se doter d’une batterie de démonstration de sa validité.
• axiomes qui combinés entre eux généreront
• des propositions qui combinées entre elles généreront
• des résultats qui seront vérifiés et qui seront validés ou non en fonction de leur degré de correspondance avec le paradigme initialement postulé.
Concrètement, qu’est-ce-que cela veut dire pour nous ? Prenons comme exemple le paradigme écosophique permettant le passage d’une économie prédatrice et destructrice à un système d’échange basé sur le respect mutuel des différents acteurs impliqués. Sa triade étant la suivante : abondance-circulation-coopération.
La Multiversité se doit donc de générer par son activité une libération de l’abondance sur un mode coopérativiste ainsi qu’une mise en circulation de l’abondance produisant des réalités vécues de prospérité partagée pour l’ensemble de ceux qui participent à ses activités. Nos axiomes pourraient être ceux du coopérativisme, du mutualisme, de la gouvernance partagée et de l’économie circulaire par exemple. Mis ensemble, ils génèrent des propositions : entreprise à vocation socio-culturelle, asbl d’éducation populaire, actions de conscientisation et d’éveil à la citoyenneté participative etc. Ensuite, il s’agira d’analyser les résultats obtenus et de les mettre en regard avec le paradigme posé. L’abondance générée a-t-elle été correctement distribuée. Le modèle relève-t-il bien d’une distribution de type coopérativiste ? Nos niveaux d’autonomie, sur une échelle de 0 à 10, ont-ils été augmenté par rapport à la situation de départ ? Le processus pour obtenir cette augmentation a-t-il été convivial ? Une fois cela effectué, l’on peut effectuer une estimation des résultats et voir ce qui peut être fait pour les améliorer lors de la prochaine traversée nous amenant de la métathéorie ( le paradigme ) qui est reconnue comme étant bonne par toutes et tous, aux axiomes ( qui composent la théorie ), aux propositions ( qui composent les postulats ), pour finalement parvenir aux résultats ( qui sont la conséquence de la mise en pratique de tout ce qui précède ). Nous insistons autant sur la définition du mot paradigme car nous le savons utilisé par tant de personnes plus ou moins à tort et à travers. Que ce mot, correctement compris, pose une exigence de rigueur, de discipline et de méthode absolue. Rigueur et discipline n’excluant d’ailleurs en rien les notions de souplesse et d’improvisation. Que ce mot, correctement compris, exige de distinguer les niveaux de la métathéorie ( une ), de la théorie ( plusieurs ) et de la pratique ( infinies ). De devoir poser un regard conscient, attentif et objectif sur ce que nous faisons. D’être en mesure de critiquer notre propre travail, loin, très loin de toute posture idéologique a priori. L’approche méthodique requise par un déroulé de manifestation paradigmatique nous faisant passer de la pensée et du concept à la matérialisation en acte de celui-ci, est ce qui nous oblige à intensifier notre relation au réel et de faire en sorte que notre subjectivité se confonde encore et toujours plus avec l’objectivité de celui-ci. S’il implique de ne pas prendre ses rêves où ses lubies pour des réalités a priori et in situ, il regorge, dans le cheminement qu’il propose, de pouvoir transformer ses rêves en réalité in situ et a posteriori, si nous parvenons à faire les bonnes choses dans le bon ordre.
« Bien qu’ayant l’Esprit vaste comme le Ciel, je porte à chacune de mes actions, une attention aussi fine que la farine ».
Cette citation de Padmasambhava ( 8ème siècle apr. J.-C. ), l’introducteur des doctrines bouddhiques au Tibet, nous indique le travail à accomplir. Ne pas confondre la théorie de l’action ( l’Esprit ) et la mise en pratique de la théorie ( l’action ). Elle nous permet également d’ouvrir une définition chère à la Multiversité Populaire. Celle de cosmocitoyenneté.
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